"Nightbreed" est un film d'horreur de Clive Barker sorti en 1990 et tiré d'un de ses livres, "Cabal" (la maison de production a imposé le changement de titre, ce qui a dû arranger Ocean qui avait déjà un jeu portant ce nom). Il raconte la descente aux enfers (littérale) d'Aaron Boone, une jeune homme dont les visions macabres qui hantent ses cauchemars se produisent dans la réalité. Un court séjour dans un hôpital psychiatrique lui permet d'apprendre l'existence de Midian, une ville souterrain cachée sous le cimetière abandonné de la ville et abritant les "nightbreeds", des créatures repoussantes réfugiées ici depuis la nuit des temps pour échapper aux campagnes d'éradication menées contre elles par les humains. Mordu par une de ces créatures, tué par la police puis ressuscité sous la forme d'un mort-vivant, Boone va devoir à la fois tenter de protéger les "nightbreeds" et échapper à un tueur en série surnommé "The Mask" (car portant sur le visage un sac de jute décoré de boutons), l'auteur des crimes dont il est accusé. "Nightbreed" (le film) a comme singularités le nombre de monstres, tous aussi originaux qu'effrayants, qui apparaissent à l'écran, ce qui a nécessité un gros travail sur les costumes et les effets spéciaux, une des rares apparitions de David Cronenberg devant la caméra plutôt que derrière, et une bande originale signée Danny Elfman.

Souhaitant probablement réitérer l'exploit de "RoboCop" (lui aussi classé "R" pour sa violence, et dont l'adaptation sur micro-ordinateurs continuait de se vendre plus d'un an après sa sortie), Ocean a acheté les droits d'adaptation du film. Gary Bracey a fait plusieurs fois l'aller-retour à Pinewood Studios, les studios britanniques où les effets spéciaux étaient réalisés, afin de suivre l'avancement du projet et découvrir les créatures au fur et à mesure de leur réalisation pour les intégrer dans les jeux. Il fait même une courte apparition dans le film, sous une épaisse couche de maquillage. Signe de leur foi en ce projet, ce sont pas moins de trois jeux qu'Ocean prévoyait de sortir : un jeu d'action pure (The Action Game), un jeu d'action/aventure (The Interactive Movie) et un jeu de rôles. Ce dernier, terminé trop tard en 1991, a été abandonné.

Le jeu d'action

Nightbreed : The Action Game est un jeu d'exploration dans lequel vous allez déplacer Boone au sein de Midian, sur trois niveaux : la surface, les passerelles au-dessus du vide, et les fins fonds de Midian. Ces niveaux communiquent par des échelles (ou parfois en plongeant dans le vide), avec des portes au premier plan ou au fond de l'écran. Inutile de préciser que vous allez devoir tracer des plans pour vous y retrouver, et il faudra faire des allers-retours pour trouver les trois clés de Midian. De toute façon, rien n'est expliqué, il faudra zoner jusqu'à atteindre l'étape intermédiaire (la rencontre avec Baphomet) qui vous transforme en créature de la nuit, pour ensuite vous débarrasser de "The Mask" et retrouver votre copine. L'adversité est composé de policiers armés et des quelques monstres bizarres, ainsi que d'autres joyeusetés : des grenades ou rochers quasiment impossibles à éviter, des mines, des bombes à retardement (à attraper pour les désamorcer)...

L'aspect des monstres rappelle celui de Shadow of the Beast, qui a peut-être servi de modèle aux développeurs, car là aussi on commence en surface avant d'aller explorer des niveaux en profondeur. Le souci, c'est que c'est infiniment moins beau, tout en étant aussi répétitif. il n'y a même pas de boss intermédiaire qui donnerait envie de s'accrocher. L'autre problème, c'est que ce n'est pas non plus digne du film : il n'y a aucune narration ou atmosphère, les musiques synthétiques de la version Amiga ne collent pas avec l'ambiance, les bruitages sont pauvres, et les quelques monstres rencontrés sont bien moins effrayants que dans le film. Elvira : Mistress of the Dark et Dark Seed démontreront plus tard ce qu'on peut faire en matière d'épouvante sur micro-ordinateurs. Et encore, je parle de la version Amiga, mais sur PC ce n'est guère mieux. On a gardé les 32 couleurs, mais on a perdu le scrolling. Le soft ne reconnaît qu'une carte-son, le peu répandu Roland LAPC1. Et pour couronner le tout, si vous n'avez pas de joystick, regardez plus bas les touches imposées au clavier. Les développeurs anglais nous ont souvent obligés à utiliser AQOP plutôt que les touches directionnelles, mais les programmeurs de ce jeu ont dû trouver que c'était encore trop pratique et en ont choisi d'autres, en position inversée (gauche et droite avec les doigts de gauche, haut et droit avec les doigts de droite), et un bouton d'action collé à eux. Mieux encore : pour donner un coup de pied, il faut appuyer sur la touche d'action ET la direction ! De quoi dégoûter le joueur de pianoter plus de cinq minutes. Qu'il était long, le chemin qui mènerait à Clive Barker's Undying...