Atrox

Introduction

Pfffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffffff.

Vous connaissez la réplique “Je ne m’attendais à rien, et je suis quand-même déçu” ? Elle apparaît dans la série Malcom, et elle est assez connue même au delà des amateurs de la série. Personnellement, je m’en sers assez régulièrement pour exprimer un sentiment de lassitude qui parfois me prend quand je lis un livre / Regarde un film / joue à un jeu qui m’avait un peu attiré, mais pour lequel je n’avais pas forcément d’attentes, et qui réussit l’exploit de ne même pas répondre auxdites attentes pourtant inexistantes. J’admets avoir souvent utilisé cette réplique de façon abusive, pour des jeux qui ne méritaient pas un tel dédain.

Mais là, par contre, je suis tombé sur un jeu qui mérite amplement cette réplique, car il est à mon sens l’incarnation même de ce sentiment. Pas un mauvais jeu, pas un jeu bon voire très bon, juste un jeu qui m’a fait pousser un looooooong soupir de lassitude pendant les quelques heures que je lui ai consacré. Après avoir écumé une certaine quantité de jeux de stratégie en temps réel au point que j’ai perdu le compte du nombre de fiches que j’ai réalisées pour le site depuis début 2024, je me suis dit qu’il serait intéressant d’aller fouiner du côté des abandonwares qui n’ont pas réussi à passer la frontière française ; en effet, nous autres petits Français n’avons pas été les plus gâtés en termes d’édition de jeux de stratégie dans notre beau pays. Nos voisins allemands et anglais ont bénéficié de plusieurs titres restés inconnus chez nous, et je me suis dit que parmi ces jeux, je trouverais une pépite à vous partager, un titre obscur qui mériterait plus de reconnaissance chez nous ! C’est donc avec une certaine naïveté que j’ai fait venir du Royaume-Uni Atrox, un obscur STR de 2001. Sortez votre souris, aiguisez vos raccourcis clavier, c’est le moment de s’envoler vers les étoiles !

Atrox est donc un jeu de stratégie en temps réel sorti en 2001 en Allemagne et en 2002 au Royaume-Uni, mais originellement sorti en 2001 en Corée du Sud. Il est l'œuvre du développeur sud-coréen Joymax, une entreprise encore active aujourd’hui dont Atrox n’est pas la première tentative de percer le marché du STR, puisque deux ans plus tôt sortait uniquement en Asie un certain Final Odyssey qui n’est jamais arrivé chez nous. Le fait que le jeu soit originaire de Corée du Sud explique de nombreuses décisions prises vis-à-vis du gameplay et de l’univers d’Atrox, puisque nous parlons du pays où la notion d’E-Sport a été créée, notamment via un pilier du STR : le Starcraft de Blizzard Entertainment. Sorti en 1998, ce jeu connaîtra un immense succès dans le pays du matin calme, succès qui reste constant encore aujourd’hui, et forcément inspirera quelques développeurs locaux, les motivant à se lancer sur le marché. Parmi ces titres made in Korea, on peut citer des jeux qui se sont détachés de leur illustre modèle pour tenter d’inventer leur propre univers et gameplay comme Kingdom Under Fire : La Guerre des héros, mais aussi des clones pas franchement subtils qui tentaient surtout d’imiter Starcraft dans l’espoir d’attirer un public toujours aussi friand du jeu de Blizzard même trois ans après sa sortie.

Atrox-ement banal

En 2334, un descendant d’Albert Einstein (qui visiblement n’avait pas la lumière à tous les étages) décide de séparer le bien et le mal de l’humanité en deux cellules, appelés Ange Noir et Ange Blanc (subtiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiil…). l’ange Blanc donnera la race des Intellion, et l’ange noir les Createse. Maintenant, les deux races et l’humanité se font la guerre sur Terre, durant un événement appelé la Guerre d’Atrox.

… Bon, on va faire comme si le scénario n’existait pas, hein ? Il est bien sûr plus complexe que ça, mais je n’allais pas vous traduire les trente pages de lore indigeste dans le manuel, mon masochisme a des limites. Nous avons donc trois races (comme dansStarcraft) dont une race d’humains, une race insectoïde à forte esthétique Zerg (comme dansStarcraft) et une race à l’esthétique robotique avec un accent mis sur la spiritualité (oooooh, bah tiens, comme dansStarcraft) qui sont censées avoir un gameplay radicalement différent les unes des autres. Et j’insiste bien sur le mot “censées”, parce que dans les faits, les trois factions suivent le même principe de développement de leur base, et utilisent les deux mêmes ressources, le Quark et le Muon, l’une étant récoltée par des unités spécifiques et l’autre via des bâtiments. Chaque faction possède des unités de base similaires mais commence à voir émerger leurs spécificités quand on se penche sur certaines unités exclusives.

Rien de bien transcendant ceci dit, et le jeu n’arrive clairement pas à la cheville de son modèle, car oui, Atrox est un clone de StarCraft au sens le plus littéral du terme : univers de science-fiction, trois factions jouables, gameplay similaire… Sauf que si Atrox était un clone tout aussi bon que StarCraft je serais un peu plus sympathique à son égard. Sauf que dans plein de petits détails, le jeu est beeeeeaucoup moins bien, et ça commence dès le menu principal quand on réalise avec horreur l’absence totale de tutoriel. Et attention, hein, le tutoriel n’est pas inclus dans le mode solo, non non non, c’est juste qu’il n’y a pas de tutoriel. Si vous voulez apprendre à jouer, lisez le manuel ! Merci le jeu, franchement fallait pas… J’imagine qu’ils se sont dit chez Joymax que comme leur jeu était un clone de StarCraft, et que le jeu se joue comme StarCraft, et que le public du jeu serait sûrement des vétérans de StarCraft, pas besoin d’inclure un tutoriel, hein ? Pas de moyen de modifier la difficulté du jeu, et autant vous dire que si vous n’avez pas l’habitude du genre, le jeu va vous casser les genoux et vous frapper au sol sans ménagement tellement la difficulté se révèle ridicule. Je sais que je ne suis pas un joueur de StarCraft chevronné (loin de là), mais quand-même, il y a des limites ! Oh, et, est-ce que j’ai mentionné l’absence d'éditeur de cartes, et le nombre très très peu élevé de cartes pour le mode multijoueur ? Non ? Bah voilà, c'est fait.

Bon, niveau fond, c’est pas bien glorieux, et sur la forme c’est presque encore pire : la musique est absolument anecdotique, et les briefings de mission de la campagne solo s’affichent sur un petit écran. Il faut donc lire très très vite les quelques phrases avant que l’écran ne passe sur la suite du texte, ce qui n’aide pas à apprécier l’univers. Même topo sur les dialogues durant le jeu, qui apparaissent et disparaissent à une vitesse folle. Oh, d’ailleurs, petit conseil, avant de lancer une partie, allez tout de suite dans les options pour diminuer la vitesse de défilement de l’écran, sinon vous allez galérer tellement l’écran défile vite si vous avez le malheur de placer votre souris au bord de l’écran, vous allez vous retrouver à l’autre bout de la carte en cinq secondes.

Que l’on soit bien clair : Atrox n’est pas mauvais dans le sens où il est injouable ou qu’il possède des aberrations d’un point de vue gameplay. En même temps, quand on copie un excellent jeu, si on se contente de tout recopier, le résultat ne peut pas être mauvais, loin de là. Cependant je pense qu’il est important de bien distinguer les mauvais jeux et les jeux chiants, vides, ceux qui même en étant compétents ne proposent absolument rien qui puisse les distinguer de la masse. Et la masse, elle existait en 2001, on était en plein dans l’âge d’or du STR, avec des très bons titres qui sortaient à la pelle. Comment Atrox pouvait-il espérer se faire une place alors qu’il n’est qu’une copie de moins bonne qualité d’un jeu sorti trois ans auparavant et extrêmement bien implanté ? Le jeu est compétent dans ce qu’il fait, et un acharné du STR qui souhaite s’amuser sur la campagne solo parce qu’il a déjà fini celle de StarCraft y trouvera peut-être son compte… Mais ça s’arrête là.

Conclusion

Je ne vois sincèrement pas à qui s'adresse Atrox. Les joueurs de StarCraft resteront sur StarCraft, les joueurs qui veulent un STR de science-fiction intéressant iront sur StarCraft ou les opus de la série Command & Conquer. Bon sang, en 2001 sortait Empereur : La Bataille pour Dune de Westwood Studios, un excellent STR (disponible sur Abandonware France) qui atomise Atrox à tous les niveaux. Et les débutants seront découragés par l’austérité du titre et se tourneront vers des jeux plus grand public et beaucoup plus pédagogues dans leur manière d’initier un néophyte à la stratégie en temps réel. Vous voulez une alternative à StarCraft qui arrive à faire ce qu’Atrox est incapable de réaliser, à savoir construire un univers original, avec un gameplay qui se détache de son modèle tout en proposant une expérience qui ne se résume pas à être une réplique de ce qui marche déjà ? Submarine Titans est déjà une option infiniment plus qualitative, que je peux ne recommander chaudement. Et si vous cherchez un excellent STR sorti au même moment et qui ne soit pas inspiré parStarCraft, tournez-vous vers Sacrifice, Battle Realms ou encore Star Wars : Galactic Battlegrounds, vous passerez un infiniment meilleur moment.

C’est d’ailleurs ce qui ressort des quelques rares tests parus dans la presse de l’époque : Le jeu est compétent dans ce qu’il fait, mais ne propose rien qui lui permette de se démarquer deStarCraft… Quel est donc l’intérêt de s’y atteler alors qu’un meilleur titre est déjà sur le marché ? La campagne solo, à la limite, la perspective d’essayer un titre sympa mais sans plus… Et encore, si la presse anglophone a été plutôt gentille, Atrox s’est fait vitrifier par la presse allemande, avec des notes parfois moitié moins élevées que ce qui a été donné par leurs confrères anglophones.

Est-ce que j’ai été dur avec Atrox ? Probablement plus que nécessaire. Mais je trouve ça triste qu’un clone aussi peu inspiré ait pu voir le jour, alors que des jeux sortis à la même période auraient pu bénéficier d’un peu plus de visibilité dans un marché qui à l'époque était saturé de jeux se copiant les uns les autres. Quand je vois que des titres comme Submarine Titans ou Sacrifice se sont retrouvés noyés dans la masse, masse constituée majoritairement de clones comme l’est Atrox, je ne peux pas m’empêcher de râler un peu. Alors oui, Atrox a probablement pris pour tout le monde, mais ça n’enlève rien au constat final : ce jeu est un abandonware peu inspiré, et dont l’intérêt pour les amateurs de STR est franchement, franchement limité. Libre à vous de vous y essayer, je suis sûr que vous pouvez passer un bon moment dessus, mais à titre personnel, je vais retourner sur Submarine Titans.

Whitecoal (Commentaire, screenshots, Jeu, scans CD-ROM)

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